Quand je vais faire un tour de galeries, il me faudrait trois bras : l’un pour mon sac, l’autre pour mon sac bis, l’autre pour mon parapluie, et j’oubliais un quatrième pour tenir bien serré le col de mon manteau, car avec la pluie, il y a le froid et le vent. Les tours de galeries, dans mon cas, se font toujours sous ce genre de climat.
En même temps, c’est cela qui me plaît: trouver ma récompense, le havre qui malgré tout ce froid, cette humidité, ces trottoirs étroits et encombrés, ces mines fermées, me fera me sentir au sec, de nouveau entière et consistante.
L’une des dernières fois que cela m’est arrivé, c’est à la galerie Nathalie Obadia que j’ai mis pied à terre, au milieu des rideaux de papier encrés de Carole Benzaken, au milieu de son flux de peinture et d’images. Il avait beau pleuvoir dehors, je me sentais parfaitement au sec, comme derrière la vitre d’un train, bien assise sur la banquette, à regarder un paysage défiler: les branches des arbres entrelacées, mouvantes, dessinant un chemin, les superpositions de couleurs, d’images rétiniennes, les stratifications du sol, les trouées de lumière entre les branches.
C’est une coulée terreuses, un chemin qui se fraye à travers les branchages, un chemin sûr, sans halte superflue, qui se laisse emprunter, qui a un sens et nous emmène au fil de ses imprévus.